ALLA RICERCA DEL TEMPO PERDUTO

L'amore per Madame de Guermantes


Amavo veramente Madame de Guermantes. Che le piombassero sul capo tutte le calamità e che, rovinata, screditata, spogliata di ciascuno dei privilegi che mi separavano da lei, priva d'una casa dove abitare e finanche di persone disposte a salutarla, venisse a implorare asilo da me; non avrei potuto chiedere a Dio felicità più grande. La immaginavo in quell'atto. (...) Ma dopo ore e ore passate a immaginare simili circostanze, a pronunciare le frasi che avrei rivolte alla duchessa accogliendola sotto il mio tetto, la situazione rimaneva invariata; nella vita reale, ahimè, io avevo scelto, per amarla, proprio la donna che riuniva in sé, forse, il maggior numero di pregi d'ogni genere e ai cui occhi, perciò, non potevo sperare di godere d'alcun prestigio: era ricca quanto il più ricco dei non nobili, senza contare il fascino personale che l'aveva resa tanto "di moda" facendone, tra tutte, una regina.

M. Proust, La parte di Guermantes I

Traduzione di G. Raboni per i Meridiani Mondadori

Versione originale:

J'aimais vraiment Mme De Guermantes. Le plus grand bonheur que j'eusse pu demander à Dieu eût été de faire fondre sur elle toutes les calamités, et que ruinée, déconsidérée, dépouillée de tous les privilèges qui me séparaient d'elle, n'ayant plus de maison où habiter ni de gens qui consentissent à la saluer, elle vînt me demander asile. Je l'imaginais le faisant. (...) 

Et quand j'avais passé des heures ainsi à imaginer des circonstances, à prononcer les phrases que je dirais à la duchesse en l'accueillant sous mon toit, la situation restait la même; j'avais, hélas, dans la réalité, choisi précisément pour l'aimer la femme qui réunissait peut-être le plus d'avantages différents et aux yeux de qui, à cause de cela, je ne pouvais espérer avoir aucun prestige; car elle était aussi riche que le plus riche qui n'eût pas été noble; sans compter ce charme personnel qui la mettait à la mode, en faisant entre toutes une sorte de reine.

Nobili "nullità".