I campanili di Martinville

«Soli, ergendosi dal livello della pianura e come sperduti in piena campagna, salivano verso il cielo i due campanili di Martinville. Presto ne vedemmo tre: venendo a collocarsi dinanzi agli altri con un volteggio ardito, un campanile ritardatario, quello di Vieuxvicq, li aveva raggiunti. I minuti passavano, noi viaggiavamo rapidamente e tuttavia i tre campanili restavano sempre in lontananza davanti a noi, come tre uccelli posati sulla pianura, immobili e ben visibili al sole. Poi il campanile di Vieuxvicq si fece da parte, si distanziò, e i campanili di Martinville rimasero soli, illuminati dalla luce del tramonto che anche a quella distanza vedevo giocare e sorridere sui loro tetti scoscesi. Ci avevamo messo tanto ad avvicinarci a loro che io pensavo al tempo che sarebbe occorso per raggiungerli quando, all’improvviso, la carrozza, dopo una svolta ci depositò ai loro piedi; ed essi le si erano parati davanti così bruscamente che avemmo appena il tempo di fermarci per non urtare contro il portico. Proseguimmo il nostro itinerario; avevamo già lasciato Martinville da un po’ di tempo e il villaggio, dopo averci accompagnati per qualche secondo, era già scomparso, quando, rimasti soli all’orizzonte a guardarci fuggire, i suoi campanili e quello di Vieuxvicq agitarono ancora in segno d’addio le loro cime lambite dal sole. A tratti uno si scostava perché gli altri due potessero vederci ancora un istante; ma la strada cambiò direzione, essi virarono nella luce come tre perni dorati e disparvero ai miei occhi. Ma, poco dopo, quando eravamo già nei pressi di Combray e il sole era ormai tramontato, li vidi un’ultima volta da molto lontano, e non somigliavano più che a tre fiori dipinti sul cielo al di sopra della bassa linea dei campi. Mi facevano pensare anche alle tre fanciulle di una leggenda, abbandonate in un luogo solitario quando già scendevano le tenebre; e mentre ci allontanavamo al galoppo, li vidi cercare timidamente il cammino e, dopo qualche maldestro sussulto delle loro nobili figure, serrarsi l’uno contro gli altri, scivolare uno dietro l’altro, non configurare più contro il cielo ancora rosato che un’unica forma nera, incantevole e rassegnata, e dileguarsi nella notte.»

Marcel Proust, Alla ricerca del tempo perduto, Dalla parte di Swann

Parte prima: Combray

pp. 220-221

traduzione di Giovanni Raboni

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«Seuls, s’élevant du niveau de la plaine et comme perdus en rase campagne, montaient vers le ciel les deux clochers de Martinville. Bientôt nous en vîmes trois : venant se placer en face d’eux par une volte hardie, un clocher retardataire, celui de Vieuxvicq, les avait rejoints. Les minutes passaient, nous allions vite et pourtant les trois clochers étaient toujours au loin devant nous, comme trois oiseaux posés sur la plaine, immobiles et qu’on distingue au soleil. Puis le clocher de Vieuxvicq s’écarta, prit ses distances, et les clochers de Martinville restèrent seuls, éclairés par la lumière du couchant que même à cette distance, sur leurs pentes, je voyais jouer et sourire. Nous avions été si longs à nous rapprocher d’eux, que je pensais au temps qu’il faudrait encore pour les atteindre quand, tout d’un coup, la voiture ayant tourné, elle nous déposa à leurs pieds ; et ils s’étaient jetés si rudement au-devant d’elle, qu’on n’eut que le temps d’arrêter pour ne pas se heurter au porche. Nous poursuivîmes notre route ; nous avions déjà quitté Martinville depuis un peu de temps et le village après nous avoir accompagnés quelques secondes avait disparu, que restés seuls à l’horizon à nous regarder fuir, ses clochers et celui de Vieuxvicq agitaient encore en signe d’adieu leurs cimes ensoleillées. Parfois l’un s’effaçait pour que les deux autres pussent nous apercevoir un instant encore ; mais la route changea de direction, ils virèrent dans la lumière comme trois pivots d’or et disparurent à mes yeux. Mais, un peu plus tard, comme nous étions déjà près de Combray, le soleil étant maintenant couché, je les aperçus une dernière fois de très loin qui n’étaient plus que comme trois fleurs peintes sur le ciel au-dessus de la ligne basse des champs. Ils me faisaient penser aussi aux trois jeunes filles d’une légende, abandonnées dans une solitude où tombait déjà l’obscurité ; et tandis que nous nous éloignions au galop, je les vis timidement chercher leur chemin et après quelques gauches trébuchements de leurs nobles silhouettes, se serrer les uns contre les autres, glisser l’un derrière l’autre, ne plus faire sur le ciel encore rose qu’une seule forme noire, charmante et résignée, et s’effacer dans la nuit.»

Marcel Proust, À la Recherche du temps perdu, Du Côté de Chez Swann, Première partie: Combray